T.I.A. (This is Africa)

de Matthieu Maunier-Rossi  France / 2014 / 7’20 

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« Bonjour, je suis en tournage à l’étranger, ma connexion est mauvaise, je ne serai pas en mesure de vous envoyer une vidéo, je suis navré. Je vous envoie la note d’intention du film, vous pouvez en extraire les éléments qui vous semblent les plus intéressants.  Bon courage !  Matthieu. »

Note d’intention du film :  

« Fin octobre, juste avant le début de la saison des pluies, je me trouvais à Brazzaville pour organiser un autre tournage et j’ai eu envie, lors des deux derniers jours sur place avant de rentrer en France, d’y tourner un film pour moi. D’en ramener un film.

J’ai pensé à un danseur congolais que j’ai rencontré sur place lors de mon arrivée, Aïpeur Foundou, et que j’ai trouvé formidable. Il combine des éléments de danse contemporaine avec des mouvements tirés des danses traditionnelles congolaises. Il est aujourd’hui chorégraphe et danseur, mais il a été l’élève de Bidiefono DelaVallet, un autre chorégraphe congolais dont on commence à entendre parler en France. J’ignorais avant d’arriver à Brazzaville l’importance de la scène de danse contemporaine dans le pays, c’est d’une effervescence incroyable.

J’ai eu envie de confronter Aïpeur à cette ville, alors nous avons choisi ensemble une série d’endroits populaires et souvent bondés, et il a dansé là, sans annonce, au milieu des passants, attirant les regards et la curiosité. Parfois l’incompréhension. Je me suis placé loin de lui pour ne pas que la caméra soit immédiatement repérée. Nous avons tout tourné en 48h avec les moyens du bord (j’avais mon Canon 7D avec moi, et un monopode, c’est tout).

Le texte est un poème original que j’ai « commandé » à Ronan Chéneau, un auteur dramatique français, qui était au Congo au même moment que moi. Lui aussi a disposé de 48h pour écrire et me permettre d’enregistrer la voix sur place. Le thème de la liberté impossible est venu de nos discussions, et de certaines paroles que nous avons entendues sur place dans les rangs des différents artistes que nous avons rencontré.

C’est pour suivre ce thème de la liberté impossible, ou contrariée, que j’ai cadré le film de cette façon, en tentant de « coincer » Aïpeur dans le cadre, en l’enserrant. Parfois il parvient d’un mouvement à échapper au cadre, il s’affranchit, mais la plupart du temps il ne peut s’en soustraire… Il doit trouver sa liberté dans un cadre, ce qui est une parfaite métaphore de la condition d’un artiste en Afrique Centrale à notre époque (J’ai eu l’occasion de travailler au Congo, au Cameroun, au Kenya et au Sénégal…)

La jeune femme dont nous avons enregistré la voix s’appelle Ella Ganga, elle aussi est danseuse à Brazzaville. J’avais envie de ce timbre hésitant, difficile, mais incarné. J’avais envie, et besoin, de cette ouverture spirituelle pour contrebalancer l’aspect très physique de cette danse. Je trouve sa voix hypnotique, comme la danse. Et nous avons délibérément choisi ces répétitions de mots, afin de créer l’esprit d’une transe.

Le fleuve déchaîné que l’on voit dans le film est le Fleuve Congo, au niveau des Cataractes du Congo (de gros rochers immergés qui brisent le courant et rendent impossible la navigation depuis l’Océan… là encore, liberté/contrainte…)

Le titre du film? « T.I.A » est une injonction que j’ai souvent entendue en Afrique, et le plus souvent ce ne sont pas des mots très flatteurs, une façon de dire « oui, les choses nous échappent à nous les blancs, mais c’est comme ça ici en Afrique… » This is Africa… J’ai toujours trouvé cette maxime réductrice, il y a en tant d’autres choses à vivre, à comprendre, dans des pays rarement simples d’accès pour des occidentaux. Alors j’ai eu envie de détourner ce T.I.A, d’en faire autre chose. Le titre de travail était T.I.A.2, pour « This is Africa Too », que j’ai trouvé finalement plus simple d’écrire « THIS is Africa », avec les majuscules, autrement dit « c’est aussi CECI l’Afrique… »

le court métrage sur grand écran